Les réformes de la retraite en Europe poursuivent un double objectif (Commission européenne, 2004, p. 6-8) : augmenter le taux d'emploi des seniors et reculer l'âge de leur départ en retraite d'une part, modifier le financement des pensions dans un sens plus contributif (avec garantie d'un niveau minimal) et selon un nouveau partage entre les pensions publiques en répartition et les pensions privées en capitalisation d'autre part. Pour interpréter ces réformes, le présent chapitre s'inscrit dans deux débats en cours qui s'expriment dans des conflits de représentation très vifs.
Le premier porte sur la nature même de ce que font les retraités : est-ce de l' « activité » ou du « travail » ? La retraite « vient récompenser une vie de travail », répond sans hésiter la Commission européenne (2004, p. 23), c'est un loisir qui certes peut être mené avec détermination mais qui ne relève pas du travail. Est-ce si sûr ? Statistiquement, les retraités sont rangés dans les inactifs. Mais cette position entre en contradiction avec l'importance et le type de la place qu'ont prise les retraités dans nos sociétés. Les déclarer voués au loisir fait fi des deux dimensions de leur activité. D'une part, qu'elle soit tournée vers le monde, vers les autres ou vers eux-mêmes, ils produisent des biens et des services utiles qui sont autant de richesse venant s'ajouter à la richesse produite par les actifs occupés. D'autre part, leur activité est monétisée selon une modalité largement liée au salaire qu'ils percevaient quand ils étaient « actifs occupés »…