Notes
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[1]
Coordinateur de la révision de la CIM-10 et du développement de la CIM-11, OMS International (Genève)
<ccoms@epsm-lille-metropole.fr> -
[2]
Centre Collaborateur OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (Lille, France)
-
[3]
Inserm, France
-
[4]
Président : Steven Hyman Harvard University, Cambridge, Massachusetts, États-Unis.
Directeur de la publication : Geoffrey Reed, World Health Organization, Switzerland.
Membres : Jose Luis Ayuso-Mateos Universidad Autonoma de Madrid Spain, Alan Flisher University of Cape Town South Africa, Wolfgang Gaebel Heinrich-Heine University Germany, Oye Gureje University of Ibadan Nigeria, Assen Jablensky University of Western Australia Australia, Brigitte Khoury American University of Beirut Lebanon; Anne Lovell Institut National de la Sante et de la Recherche Médicale France, Maria Elena Medina-Mora Instituto Nacional de Psiquiatria Ramon de la Fuente Mexico, Afarin Rahimi Tehran University Iran, Norman Sartorius Switzerland, Pratap Sharan All India Institute of Medical Sciences India, Pichet Udomratn Prince of Songkla University Thailand, Xiao Zeping Shanghai Jiaotong University, People’s Republic of China, Tesfamicael Ghebrehiwet International Council of Nurses, Michael Klinkman World Organization of National Colleges, Academies, and Academic Associations of General Practitioners/Family Physicians (WONCA), Mario Maj World Psychiatric Association, Per-Anders Rydelius International Association of Child and Adolescent Psychiatry and Allied Professions, Ann Watts International Union of Psychological Science
Introduction
1Actuellement, l’OMS, qui a, entre autres, la responsabilité de la révision des nomenclatures internationales des maladies, des causes de décès et des pratiques de santé publique, et la standardisation des procédures diagnostiques selon les besoins [1], est en train de réviser la Classification internationale des maladies et des problèmes de santé connexes, Dixième révision (CIM-10) [2] validée en 1990. Il est prévu que la CIM-11 soit soumise pour approbation à l’Assemblée mondiale de la santé en mai 2015.
2La CIM est le standard international pour l’information sanitaire, pour l’évaluation et la surveillance de la mortalité, de la morbidité et des autres paramètres de santé. Un objectif clé de la classification des troubles mentaux et du comportement de la CIM-11 est de permettre une identification et une priorisation plus large et efficace pour les personnes souffrant de troubles psychiques qui ont besoin de traitement. En effet, les conditions d’accès aux services de santé mentale et le choix des traitements sont fortement influencés par la classification diagnostique. Des critiques sérieuses ont été formulées quant à l’utilité clinique des systèmes actuels de classification des troubles mentaux [3], tant pour la CIM-10 que pour le Manuel diagnostique et statistique des maladies mentales de l’Association américaine de psychiatrie [4].
3Le développement de la CIM-11 nécessite une vision mondiale et un processus multilatéral efficace. Il doit procurer aux utilisateurs de la CIM du monde entier une possibilité réelle d’influencer le contenu final. Aussi, le processus de révision et son résultat doivent être développés en plusieurs langues. L’implication des professionnels francophones dans la révision de la CIM-10 et le développement la CIM-11 sont à ce jour beaucoup trop faible pour peser dans cette révision. C’est pour cela que l’OMS et le CCOMS de Lille mettent en place actuellement un réseau francophone pour la révision de la CIM-11.
Historique et comparaison du développement DSM et CIM
4Les deux systèmes de classification ont deux origines et deux finalités différentes qui impliquent des difficultés de comparaison et de compréhension réciproque. Beaucoup d’efforts ont été faits pour réduire cette distance dans les dernières décennies mais la logique et la raison d’être de la CIM demeurent différentes de celles du DSM [5].
5La naissance d’un système de classification international qui puisse aider à le collecte d’informations épidémiologiques fiables et utilisables par tous les gouvernements du globe, remonte à la fin du xixe siècle. À cette époque, les sociétés se sont rendues compte qu’il fallait avoir la possibilité de comptabiliser les causes de décès de manière homogène et ce dans tous les pays du monde. Le point de départ de la CIM remonte donc à la conférence internationale pour la révision de la classification de Bertillon de la liste internationale des causes de décès, qui s’est tenue à Paris en 1900.
6Cette conférence signe la date de naissance de ce que l’on nomme aujourd’hui la « Classification internationale des maladies ». Cette liste, sur laquelle l’ensemble des pays participant à la conférence s’est mis d’accord, a été révisée pour la deuxième fois en 1909 puis en 1920, 1929 et 1938. Cette liste de maladies, tout en devenant de plus en plus riche et complexe, n’était pas encore une classification des maladies et elle n’abordait pas la question des troubles psychiques.
7C’est à partir de juillet 1946, date de la phase préparatoire pour la sixième révision, que la liste des causes de décès se révéla insatisfaisante par rapport aux exigences des systèmes épidémiologiques nationaux. Il est alors décidé d’une approche statistique concernant la morbidité en même temps que la mortalité et la commission préparatoire, dans le cours de ses travaux, propose d’utiliser le titre de « Classification internationale des maladies, blessures et cause de décès ». La conférence pour mettre en œuvre la sixième révision, tenue en avril 1948, pour la première fois utilise le nom de « ICD » (CIM en langue française) et introduit la nécessité que chaque système épidémiologique national soit relié à l’Organisation des nations unies pour la création d’un observatoire mondial de la santé.
8Parmi les multiples innovations, la classification ICD-6 intègre pour la première fois les maladies psychiques. Il s’agit d’une première ébauche de classification des maladies mentales, fortement influencée par la nomenclature de l’administration des vétérans (États-Unis).
9Cette première inclusion des troubles psychiques parmi les maladies classées dans la CIM-6 est considérée comme insuffisante et le comité de l’Association psychiatrique américaine pour la nomenclature et la statistique décide dès ce moment de développer une variante de l’ICD-6. En 1952 est publiée la première édition du « Diagnostic and Statistical Manual Mental Disorders (DSM-I) ». Le DSM-I contient un glossaire descriptif des catégories diagnostiques qui, pour la première fois, a pour but explicite l’utilisation du manuel dans la pratique clinique, pour faciliter et homogénéiser les orientations diagnostiques des psychiatres.
10À partir de cette date, les publications des deux classifications ont été parallèles, tout en restant ancrées dans des perspectives différentes.
11La CIM est, et a toujours été, fortement orientée vers une perspective internationale, avec la nécessité d’intégrer plusieurs approches linguistiques et culturelles. Elle répond à l’exigence de donner aux gouvernements des orientations et des recommandations pour la mise en œuvre des systèmes publics de santé mentale en restant attentive à l’implication de toutes les parties prenantes en faveur de l’amélioration des services en santé mentale. Tout en considérant les différences économiques, culturelles et organisationnelles, des pays membres de l’ONU.
12Cette perspective volontairement globale a été la raison du progressif alourdissement des procédures de révision, et du retard dans la présentations des nouvelles révisions de la CIM, par rapport au tableau de bord initialement prévu.
13La 11e révision, qui devrait paraître en 2015, suit à 25 ans de distance la dixième, qui, en paraissant en 1990, avait elle-même pris cinq ans de retard par rapport aux échéances prévues.
14En revanche, le DSM se veut plus une « boîte à outils » pour la définition du diagnostic. Il a introduit des innovations comme le diagnostic multi-axial et la prise en compte d’un axe dimensionnel [6], interne au diagnostic avec d’autant plus de souplesse que sa perspective n’était celle que de la psychiatrie américaine (le DSM est toujours l’expression de l’Association psychiatrique américaine) et/ou anglophone.
15Un particularisme qui est devenu, petit à petit, majoritaire et qui influence aujourd’hui fortement les travaux de révision de la CIM-10 et de développement de la CIM-11. Le DSM-V va être présenté en 2013, anticipant de deux ans la 11e révision de la CIM.
16L’enjeu principal de la CIM, qui demeure essentiel dans une perspective globale, est, malgré la lourdeur du processus de révision, l’implication d’autres partenaires que les psychiatres dans la réflexion autour du système de classification diagnostique. Ce qui entraîne nécessairement des réflexions éthiques autant que scientifiques autour des facteurs à l’origine des changements de classification psychiatrique.
17C’est cet aspect éthique qui fait la différence entre la CIM et le DSM et oblige les professionnels à entamer un dialogue avec les citoyens et les décideurs politiques afin d’arriver à une classification pour les personnes malades et pas uniquement des maladies.
Quelques exemples concernant les actualités du processus de révision de la CIM-10 : focus sur trois thématiques
18Au niveau international, 15 groupes de travail ont été mis en place par l’OMS (tableau 1). Ils ont rendu récemment leurs propositions au comité de pilotage [4] chargé par l’OMS du chapitre 5 de la CIM sur les troubles mentaux et du comportement. Ces propositions ne sont pas encore validées par l’OMS, elles ne représentent pas la position officielle de l’OMS.
Groupes de travail pour la révision de la CIM-10
Groupes de travail pour la révision de la CIM-10
19Pour la France, rappelons que la CIM est utilisée officiellement par la République française comme classification des maladies au niveau national. Le CCOMS de Lille a été contacté par l’OMS Genève pour mettre en place une réflexion française et plus largement francophone. Pour cela, nous nous sommes rapprochés du CERMES3–Eq. CESAMES, de la Fédération française de psychiatrie, de l’information psychiatrique, des associations d’usagers et d’aidants concernés par les trois thèmes que nous avons choisis d’approfondir pour organiser des journées de réflexion de la psychiatrie française et francophone regroupant à chaque fois professionnels, usagers et cliniciens concernés par le thème.
20Le premier thème portait sur les troubles schizophréniques et délirants (F20 à F29). Cette première journée a eu lieu le 12 octobre 2010 à l’EPSM Lille Métropole à Armentières. C’est ce thème qui a porté le plus fortement la question de la stigmatisation que peut induire intrinsèquement toute classification. En particulier pour la schizophrénie dont l’entité scientifique et le terme mêmes ont été débattus [7]. Ce qui est aussi vrai pour l’autisme et le trouble de l’identité sexuelle.
21Le deuxième aspect concerne la classification en psychiatrie infanto-juvénile pour laquelle la psychiatrie française possède une entité nosologique et pronostique à défendre (la CFTEMEA). L’implication des associations de parents a été déterminante dans le choix des mots et des concepts, avec par exemple, le refus du terme « psychose » et « autisme » pour leurs enfants. Le 24 novembre 2010, à la faculté des Saints-Pères à Paris, a eu lieu la journée sur les troubles de l’enfance et de l’adolescence (F84, F90 à F98) en présence des associations de famille et de Roger Mises.
22Enfin, le troisième aspect concernait les troubles du genre qui interrogent à l’évidence les limites des classifications au regard des aspects culturels, politiques et sociaux ainsi que l’importance de l’action des associations d’usagers pour leur dépsychiatrisation. Cette séance a eu lieu à La Sorbonne le 17 décembre 2010. Elle concernait les diagnostics F64, F65 et F66 sur les troubles liés aux genres.
23À chaque journée, huit interventions de 30 minutes eurent lieu. Elles ont été publiées par la Revue de « l’information psychiatrique » [8–10].
24Si pour les troubles psychotiques et la schizophrénie, il y a eu un accord général pour essayer de trouver une dénomination non stigmatisante, pour la psychiatrie de l’enfant l’opposition a été extrêmement forte entre les associations de familles et les psychiatres, et enfin, pour les troubles du genre, l’opposition a été totale entre les psychiatres de la SOFECT et les associations de personnes trans. Cela a d’ailleurs amené à une position de la Fédération française de psychiatrie qui est en opposition avec la prise de position des associations de personnes trans et en décalage avec les droits des citoyens et des minorités au niveau international.
Statut des troubles psychotiques dans la CIM-11
25Les termes retenus par le groupe de travail dédié à cette question sont « spectre de la schizophrénie et autres troubles psychotiques primaires » et regrouperaient [11] :
- schizophrénie ;
- trouble schizoaffectif ;
- trouble psychotique aigu et transitoire ;
- trouble schizotypique ;
- troubles hallucinatoires ;
- autres troubles psychotiques primaires ;
- troubles psychotiques primaires non spécifiés.
- au moins un des éléments suivants : délires, troubles de la conscience de soi (p. ex., pensée imposée ou retrait), hallucinations, trouble du cours de la pensée et un symptôme additionnel parmi une liste plus longue ;
- maintien de la durée d’un mois pour la phase symptomatologique ;
- pas de nécessité de handicap fonctionnel ;
- suppression des sous-types (p. ex., paranoïde, hébéphrénique…) ;
- qualification de l’évolution pour distinguer les premiers épisodes des épisodes multiples, indication de la phase actuelle (p. ex., rémission partielle ou complète) ;
- qualification des symptômes actuels : positifs, négatifs, dépressifs, maniaques, psychomoteurs, handicap cognitif.
Statut des troubles liés à l’identité de genre dans la CIM-11
26Les termes proposés par le groupe de travail sont : « incongruence du genre » [12]. La définition provisoire qui en est donnée est la suivante : l’incongruence du genre est caractérisée par une incongruence marquée entre le genre vécu et exprimé d’une personne et le genre biologique qui conduit souvent lors de l’adolescence ou à l’âge adulte à un désir de transition et une volonté d’être accepté comme un membre de l’autre genre. Rétablir la congruence peut inclure un traitement hormonal, la chirurgie ou d’autres services de soin pour permettre au corps de la personne de correspondre, autant que possible, avec le genre vécu/exprimé. L’impossibilité de vivre avec le genre vécu/exprimé peut être associée à une détresse cliniquement significative ou un handicap social ou professionnel.
27La reclassification pourrait être décidée, ce qui ferait prévaloir les droits des personnes et en particulier des personnes trans sur le principe de précaution, très discutable dans l’histoire de la psychiatrie et de la santé mentale. Cette proposition de changement d’appellation devrait permettre :
- de s’assurer d’une reclassification « non pathologisante » ;
- d’aider à accompagner les personnes qui ont besoin d’un traitement et favoriser l’accès aux services de santé appropriés ;
- de trouver une place dans la CIM permettant les soins nécessaires sans psychiatriser ; prendre en compte l’aspect médical reste important en la matière, mais peut-être faut-il l’intégrer dans un chapitre séparé.
Statut des troubles du spectre autistique
28De façon générale, le groupe de travail propose de retirer le regroupement « apparition dans l’enfance » et d’introduire une perspective de développement sur la vie entière.
29Les « troubles neurodéveloppementaux » incluant les troubles autistiques seront compris dans une catégorie particulière. Ils regrouperont :
- troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité ;
- troubles du développement intellectuel ;
- troubles développementaux de la communication ;
- troubles de l’apprentissage ;
- troubles développementaux de la coordination motrice ;
- tics (incluant syndrome de Gilles-de-la-Tourette) ;
- stéréotypies (avec ou sans automutilation) ;
- troubles du spectre autistique.
- des manifestations dans la petite enfance, mais des formes atténuées peuvent apparaître plus tard ;
- des handicaps dans le langage et la communication, dans les interactions sociales ; comportements et intérêts stéréotypés et répétitifs ;
- le niveau intellectuel peut être déficient et/ou développement de talents inhabituels.
Développement de la CIM-11 en francophonie
30À ce jour, la plupart des groupes ont finalisé leurs propositions initiales sur les catégories à inclure, les définitions et les guides diagnostiques. Les propositions doivent être publiées sur Internet mi-2013 pour une consultation publique et un recueil des commentaires. Les consultations de terrain par Internet via le Réseau de pratique clinique globale doivent commencer prochainement. Des études de terrain sont prévues à partir de juin 2013. Mi-mars 2013, les francophones inscrits au Réseau de pratique clinique globale sont une cinquantaine, alors que mille sont nécessaires pour un réseau actif. Le processus d’enregistrement est proposé en français sur le site Internet de l’OMS mais les éléments d’enquête en ligne et de terrain ne pourront être développés en français si le nombre de francophones impliqués n’augmente pas rapidement. C’est pourquoi l’OMS, le CCOMS (Lille, France), les autres centres collaborateurs francophones de l’OMS (Montréal, Casablanca, Genève) ainsi que le ministère de la Santé belge collaborent actuellement à un projet commun afin de mener toutes les révisions significatives en français simultanément à celles menées dans d’autres langues (Anglais, Arabe, Chinois, Espagnol, Russe…). Il s’agit d’arriver à une représentation multilangues plutôt qu’à de simples traductions, c’est-à-dire une équivalence de concepts plutôt qu’une traduction mot à mot.
31L’objectif du projet est de garantir la participation aussi large que possible de la communauté francophone et particulièrement dans les pays à faibles et moyens revenus. Près de 30 pays dans le monde utilisent le français comme langue officielle et, dans une douzaine de pays supplémentaires, le français est largement parlé. La majorité sont des pays en développement, dont la participation au processus de révision est importante pour l’OMS pour les raisons décrites ci-avant. De plus, il y a cinq départements d’outre-mer et six territoires d’outre-mer en France.
32Plus spécifiquement, les missions et objectifs du projet sont les suivantes.
Mission 1 : favoriser le recrutement de professionnels de santé francophones pour participer au Réseau mondial OMS de pratique clinique (Global Clinical Practice Network [GCPN]) pour la Révision de la CIM-10 : troubles mentaux et du comportement et le développement de la CIM-11
33Les tests en ligne (Internet) du matériel CIM-11 s’effectueront au travers du Réseau mondial de pratique clinique (RMPC). Ce réseau mondial sera constitué de professionnels exerçant dans le champ de la santé mentale et de la santé primaire (par exemple des psychiatres, psychologues, médecins généralistes, médecins de soins primaires, infirmiers, travailleurs sociaux, travailleurs en santé communautaire…). Tous les professionnels de la santé mentale et de la santé primaire qui ont achevé leur formation et ont le droit et la qualification nécessaires pour exercer dans leur pays peuvent intégrer le RMPC. Ils participeront aux études en lignes selon leurs domaines d’expertises, leurs sphères d’intérêt et les caractéristiques de leur pratique.
34Ces enquêtes ont pour but d’évaluer la justesse des critères, la faisabilité et l’utilité clinique de la nouvelle classification. Les questionnaires interrogeront les cliniciens sur :
- la précision des critères diagnostics et des prescriptions de la CIM-11 ;
- la facilité ou la difficulté de poser un diagnostic sur la base de la nouvelle classification ;
- la pertinence des descriptions cliniques.
35Résultats attendus : 1 000 praticiens francophones enregistrés aux RMPC.
Mission 2 : traduction du matériel et des outils pour les recherches en ligne via Internet et les enquêtes de terrain
36En concertation avec le secrétariat de l’OMS et le réseau francophone, le CCOMS (Lille, France) coordonnera la traduction des protocoles et outils constituant les enquêtes en ligne via Internet et de terrain auxquelles participera le réseau francophone. Le protocole de traduction répondra aux exigences de l’OMS en termes de traduction (rétrotraduction, relecture par des lecteurs francophones de diverses régions et pays pour assurer l’équivalence linguistique) et fera l’objet d’une validation par l’OMS avant utilisation. Le CCOMS (Lille, France) garantira la participation financière des pays à haut revenus (p. ex., France, Canada, Belgique, Suisse) pour couvrir les dépenses liées à la traduction.
37Résultats attendus : traduction effectuée et validée par les centres collaborateurs et pays participants et soumis à l’approbation de l’OMS ; garantie de fonds pour financer les activités de traduction.
Mission 3 : développement d’un réseau francophone pour assurer la participation aux études cliniques de terrain
38Les études cliniques de terrain seront menées au travers le réseau de collaboration « International Field Study Centers (IFSC) – Centres Internationaux d’Études de Terrain » qui a été mis en place par l’OMS. Les centres internationaux fourniront les dispositifs, les évaluateurs et les résultats pour ces études. Des évaluateurs travaillant dans différents dispositifs de soins (santé primaire, dispositifs de soins pour personne présentant des déficiences intellectuelles…) seront engagés selon les besoins. Les études de terrain viennent de débuter (janvier 2013) la saisie des données doit être achevée pour décembre 2014.
39En concertation avec le Secrétariat de l’OMS, le Centre Collaborateur OMS (Lille, France) développera un réseau de centres francophones volontaires pour participer à des études de terrain selon les protocoles établis. De plus, le CCOMS (Lille, France) garantira la participation financière des pays à haut revenus (p. ex., France, Canada, Belgique, Suisse) pour permettre la mise en place des études de terrain dans les pays à ressources faibles et moyennes. Le pourcentage d’un financement alloué par l’OMS pour couvrir les dépenses administratives et logistiques pourra être envisagé.
40Résultats attendus : constitution d’un réseau francophone d’études cliniques de terrain d’au moins 10-12 centres dans un éventail de pays francophone identifiés puis validés par l’OMS. Garantir le financement pour le déroulement des études de terrain clinique dans ce réseau.
Mission 4 : proposition d’une stratégie pour la mise en place d’un réseau mondial d’usagers et d’aidants pour la révision de la CIM-10
41Sur la base de l’expertise du CCOMS (Lille, France) dans la participation des usagers et des aidants dans les différents champs de la santé mentale, l’OMS demande que lui soit proposée une stratégie incluant des objectifs précis et des partenaires potentiels afin de mettre en place un réseau mondial des représentants/associations d’usagers et d’aidants pour la révision de la CIM-10. Ce réseau s’appuierait sur des ONG de la zone EURO de l’OMS dans un premier temps du fait qu’elles sont les plus structurées et opérationnelle, et sur les associations d’usagers nord américaines, en particulier québécoises particulièrement avancées dans l’empowerment et dans la participation aux recherches dans le champ de la santé mentale. Le premier objectif sera de définir avec les représentants de ces associations, le CCOMS (Lille, France) et l’OMS une stratégie en co-construction dès le départ où sera définie la représentativité des personnes à consulter, les questions concernant la définition des troubles et de leur définition non stigmatisante. Le second sera d’envisager l’extension de cette démarche aux autres zones OMS dans le monde.
Conclusion : nécessité d’un groupe francophone pour la révision de la CIM-11
42La démarche de l’OMS est donc mondiale et intègre la nécessité d’une classification tenant compte de la culture et des langues utilisatrices. Plus encore que dans les autres disciplines, la psychiatrie nécessite cette approche. Les troubles psychiques sont avant tout faits des mots pour les décrire et les modalités de décodages et de soins sont inscrits dans les pratiques locales. Il en est de même des thérapies disponibles qui varient suivant les pays et des dispositifs médicaux mis en œuvre localement.
43De nombreux pays n’ont pas de psychiatres et l’accès aux soins passe par la reconnaissance des troubles par les personnels de soins de santé primaire (médecins généralistes, infirmiers, etc.). Les soins sont de même efficaces si les diagnostics posés par les professionnels ne sont pas porteurs eux-mêmes d’une stigmatisation, et pour cela l’avis des usagers et aidants est fondamental.
44La France est encore très peu présente dans les groupes de travail, essentiellement de langue anglaise, et elle continue à développer ses propres outils. Cette position est prise en considération par l’OMS. La création d’un groupe francophone devrait permettre la prise en compte de ces aspects, tout en reconnaissant la nécessité de concepts communs de référence pour les troubles psychiques dans le monde. De plus, le développement du travail avec les associations d’usagers et d’aidants est en ligne directe avec le plan d’actions mis en place par l’OMS Europe et la Commission européenne qui intègre « l’empowerment » des usagers en santé mentale. Le Centre collaborateur de l’organisation mondiale de la santé pour la recherche et la formation en santé mentale de Lille (CCOMS, Lille, France) a joué un rôle important dans cette action, et continuera à faire en sorte que le point de vue des usagers soit pris en compte dans la révision de la classification des maladies de l’OMS. Il fera aussi tout ce qui est possible pour faire valoir les spécificités francophones dans cette nouvelle classification, en associant à sa démarche tous les psychiatres, psychologues, médecins, infirmiers, travailleurs de la santé mentale et les associations scientifiques intéressées. Et ceci en association avec les centres collaborateurs de l’OMS en santé mentale de Montréal, Genève, Casablanca et le ministère de la Santé de Belgique.
45Conflits d’intérêts : A. Lovell est membre de l’International Advisory Group for the Revision of ICD 10-C4.5
Références
- 1World Health Organization. Basic documents, 46th edition. Geneva, Switzerland :World Health Organization, 2007.
- 2Reed GM. Vers la CIM-11 : créer un espace pour une diversité de perspectives. Inf Psychiatr 2011 ; 87 : 169-73. doi:10.1684/ipe.2011.0755.
- 3World Health Organization. International classification of diseases and related health problems, 10th revision. Geneva, Switzerland : World Health Organization, 1992.
- 4Reed GM. Toward ICD-11: improving the clinical utility of WHO’s international classification of mental disorders. Professional Psychology: Research and Practice 2010 ; 41 : 457-64.
- 5Kendell R, Jablensky A. Distinguishing between the validity and utility of psychiatric diagnoses. Am J Psychiatry 2003 ; 160 : 4-12.
- 6Kendler K, First M. Alternative futures for the DSM revision process: iteration vs. paradigm shift. Br J Psychiatry 2010 ; 197 : 263-5.
- 7Guelfi JD. L’avenir des classifications des psychoses chez l’adulte. Inf Psychiatr 2010 ; 86 : 127-34.
- 8Troubles schizophréniques. Inf Psychiatr 2011 ; 87.
- 9Troubles liés au genre. Inf Psychiatr 2011 ; 87.
- 10Troubles envahissants du développement/hyperactivité déficit de l’attention. Inf Psychiatr 2011 ; 87.
- 11Gaebel W, et al. Status of psychotic disorders in ICD 11. Schizophrenia Bulletin 2012 ; 38 : 895-8. doi:10.1093/schbul/sbs104.
- 12Drescher J, et al. Minding the body: Situating gender identity diagnoses in the ICD-11. Int Rev Psychiatr 2012 ; 24 : 568-77.
Mots-clés éditeurs : étude comparative, CIM-11, DSM, autisme infantile, identité sexuée, langue française, schizophrénie, CIM, historique, nosologie
Date de mise en ligne : 24/05/2013
https://doi.org/10.1684/ipe.2013.1056Notes
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[1]
Coordinateur de la révision de la CIM-10 et du développement de la CIM-11, OMS International (Genève)
<ccoms@epsm-lille-metropole.fr> -
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Centre Collaborateur OMS pour la recherche et la formation en santé mentale (Lille, France)
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Inserm, France
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[4]
Président : Steven Hyman Harvard University, Cambridge, Massachusetts, États-Unis.
Directeur de la publication : Geoffrey Reed, World Health Organization, Switzerland.
Membres : Jose Luis Ayuso-Mateos Universidad Autonoma de Madrid Spain, Alan Flisher University of Cape Town South Africa, Wolfgang Gaebel Heinrich-Heine University Germany, Oye Gureje University of Ibadan Nigeria, Assen Jablensky University of Western Australia Australia, Brigitte Khoury American University of Beirut Lebanon; Anne Lovell Institut National de la Sante et de la Recherche Médicale France, Maria Elena Medina-Mora Instituto Nacional de Psiquiatria Ramon de la Fuente Mexico, Afarin Rahimi Tehran University Iran, Norman Sartorius Switzerland, Pratap Sharan All India Institute of Medical Sciences India, Pichet Udomratn Prince of Songkla University Thailand, Xiao Zeping Shanghai Jiaotong University, People’s Republic of China, Tesfamicael Ghebrehiwet International Council of Nurses, Michael Klinkman World Organization of National Colleges, Academies, and Academic Associations of General Practitioners/Family Physicians (WONCA), Mario Maj World Psychiatric Association, Per-Anders Rydelius International Association of Child and Adolescent Psychiatry and Allied Professions, Ann Watts International Union of Psychological Science