Couverture de SPUB_061

Article de revue

L'accueil dans les restaurants scolaires d'enfants présentant une allergie alimentaire, une enquête en Maine-et-Loire

Pages 151 à 154

Notes

  • [1]
    Département universitaire de santé publique, UFR médecine Angers, 49045 Angers cedex 01.
  • [2]
    Service de promotion en faveur des élèves, 49000 Angers.
English version

Introduction

1La prévalence de l’allergie alimentaire en pédiatrie est en constante augmentation, touchant 6 à 8 % des enfants [4, 5]. Pour une prise en charge médicale adaptée, durant ce moment de vie obligatoire et nécessaire à l’intégration sociale, un projet d’accueil individualisé (PAI) a été mis en place [3, 6, 7]. De son instauration jusqu’à son application, le parcours peut être difficile. L’objectif de notre étude était d’évaluer cette prise en charge à travers une enquête ciblant trois acteurs jouant un rôle essentiel dans l’application du PAI ; les parents de l’enfant, le médecin scolaire et le personnel de restauration scolaire.

Matériel et méthodes

2Durant l’année scolaire 2004, nous avons adressé un auto questionnaire aux 31 médecins scolaires relevant des six centres médico-scolaires du département. Une enquête auprès des six centres a permis de retenir 65 dossiers de PAI répartis sur 47 établissements scolaires. Des contacts avec l’inspecteur d’académie (établissements du second degré), les municipalités concernées (premier degré) et les chefs d’établissement (secteur privé du premier et second degrés) nous ont permis de contacter 40 équipes de restauration (sur 47). L’auto questionnaire destiné aux personnels permettait d’évaluer leur connaissance du PAI et l’application du régime d’éviction. Enfin nous avons adressé 65 auto questionnaires aux familles des enfants bénéficiant d’un PAI.

Résultats

3Quatre vingt pour cent des médecins (25/31) ont répondu au questionnaire. La moitié d’entre eux avaient eu à gérer entre 5 et 9 PAI. Quatre vingt douze pour cent se sentaient suffisamment bien formés : un tiers avait cependant rencontré des difficultés dans l’explication de la reconnaissance des signes d’alerte auprès des personnels des cantines. Une majorité d’entre eux estimait que ces enfants étaient bien intégrés au milieu scolaire et que les personnels faisaient preuve d’une bonne compréhension et d’une bonne volonté tant au niveau des agents territoriaux qu’au niveau du personnel enseignant. La collaboration entre eux et le médecin allergologue était par ailleurs excellente.

4Quatre vingt pour cent des équipes (40/47) ont accepté de remplir le questionnaire. Les établissements concernés étaient majoritairement des écoles du premier degré. Sur les 59 % des établissements situés en milieu rural, un sur deux était public.

5L’âge moyen des enfants était de 7 ± 3 ans et les garçons représentaient 58 % de la cohorte. Les allergies étaient dominées par l’arachide (51 %) et l’œuf (37 %). Sur les 65 enfants recensés, 31 étaient concernés par au moins deux aliments allergisants.

6Un tiers d’entre eux bénéficiait toujours d’un panier-repas préparé par les parents et apporté par l’enfant et un autre tiers d’un menu spécial préparé par l’école.

7Pour une majorité des personnels (85 %) l’organisation des repas était jugée facile : les difficultés rencontrées concernaient l’obtention de la composition des repas lorsque ces derniers étaient fournis par une société et la recherche d’un produit frais de substitution, en raison des difficultés de gestion de stocks de tels produits. La conduite à tenir en cas d’urgence était jugée claire dans 100 % des cas par le personnel de restauration et de surveillance. La trousse d’urgence se trouvait à la cantine au moment du repas dans 60 % des cantines visitées ; dans les autres cas, elle se trouvait dans le bureau de la direction (17 %) de l’infirmerie (10 %) ou dans une salle annexe (8 %).

8Un tiers des familles contactées avaient répondu au questionnaire. Près d’un parent sur deux (46 %) s’était senti inquiet lors de la mise en place du PAI ; inquiétude liée à la crainte de ne pouvoir accéder à la restauration scolaire (16 %) voire même à celle qu’ils ne puissent inscrire leur enfant à l’école publique. Le manque de formation et de sensibilisation à la pathologie du personnel enseignant était un autre objet d’inquiétude. La mise en place du PAI était jugée comme une « lourdeur administrative » avec ses problèmes de responsabilités « pour lesquels personne ne veut s’impliquer ».

9Le PAI était rédigé à la demande des parents, mais l’initiative provenait d’autres sources (tableau I). Près de 70 % des parents n’avaient rencontré aucune difficulté dans l’aménagement du repas (goûter ou cantine) ; 90 % des parents interrogés n’avaient rencontré aucune difficulté dans l’inscription de leur enfant à l’école. Tous étaient satisfaits de l’accueil réservé à leur enfant : le fait de manger à la cantine socialisait leur enfant même s’il existait une certaine appréhension au début, par crainte d’isolement de l’enfant.

Tableau I

Différentes entités à l’initiative du PAI

ActeursPourcentage
Parents13 %
Allergologue17 %
Médecin scolaire20 %
Directeur d’école23 %
Restauration scolaire10 %
Autres (instituteur, autre spécialiste…)17 %
Total100 %

Différentes entités à l’initiative du PAI

Discussion

10La très bonne participation des médecins scolaires à l’enquête et le fait que deux tiers d’entre eux prenaient en charge au moins 5 PAI sont de bonne augure : ils sont pleinement concernés par le problème et ont une position de leader dans la mise en place du dispositif.

11Ils sont cependant un quart à avoir rencontré des difficultés pour expliquer, au personnel de restauration scolaire, comment reconnaître les signes d’alerte.

12Dans notre étude, les enfants qui se restauraient à l’école et pour lesquels un PAI était instauré pour allergie alimentaire, étaient majoritairement âgés de moins de 10 ans et scolarisés dans des établissements du premier degré. En effet, à partir du collège, bien souvent les repas sont servis sous forme de « self-service » à choix multiples et l’enfant, responsabilisé, évite de lui-même l’allergène. L’enquête a révélé que les inquiétudes des personnels de restauration sont essentiellement liées à la gestion de multiples régimes pour un même cuisinier, à celles des plats industriels livrés par des sociétés de restauration collective et la présence d’enfants allergiques aux aliments suivants : arachide, œuf et lait.

13Dans la moitié des établissements visités, les enfants se restaurent essentiellement avec un panier-repas. On pourrait envisager le recours systématique à ce dernier en cas d’allergie à l’arachide, l’œuf ou chez les enfants poly-allergiques, comme cela a été proposé en 2003 par une Commission tripartite [3].

14En pratique, dans notre enquête, ce sont en majorité les personnels encadrant de l’Éducation nationale et les médecins scolaires qui ont informé les parents de l’existence du PAI et de la nécessité de sa mise en place : ce résultat démontre la sensibilisation de l’éducation nationale et des médecins scolaires au risque allergique alimentaire. On note cependant qu’un quart des médecins interrogés ont essuyé un refus de PAI pour allergie alimentaire : l’éducation nationale se doit de tout mettre en œuvre pour accueillir ces enfants allergiques en toute sécurité car le législateur est intervenu à 2 reprises [1, 2]. Or, certaines municipalités, qui n’ont pas cette obligation, sont moins sensibilisées et donc refusent parfois l’accès à la cantine de ces enfants : ne faudrait-il pas revoir le problème des responsabilités engagées pour les agents territoriaux ?

Conclusion

15Le PAI, dans sa conception actuelle, est un excellent outil : il est bien compris et bien appliqué par le personnel de restauration scolaire qui est la cible du PAI Il est donc important de bien poser l’indication et d’impliquer ce personnel dès sa conception.

16Les difficultés viennent de la méconnaissance des signes de la maladie allergique et de l’utilisation potentielle de l’adrénaline injectable : la mise à disposition d’une vidéo nous paraît être une solution envisageable.

17Au fil des années, des établissements scolaires ont mis en place une organisation irréprochable pour la gestion du PAI, de la gestion du régime jusqu’à la formation du personnel scolaire, ce qui permet l’accueil à l’école des enfants tout en rassurant parents, médecins scolaires, municipalités… Pouvoir le démontrer aux structures, non encore concernées par le PAI, permettrait peut-être d’essuyer moins de refus. Ces derniers restent préjudiciables pour l’enfant, car l’intégration de l’enfant allergique alimentaire à l’école passe par la possibilité de manger à la cantine.

BIBLIOGRAPHIE

  • 1
    Circulaire n° 2003-135 du 18/09/2003. Accueil des enfants et des adolescents atteints de troubles de la santé.
  • 2
    Circulaire n° 93-248 du 22/07/1993. Accueil des enfants et adolescents atteints de trouble de la santé évoluant sur une longue période dans des établissements d’enseignements publics et privés sous contrat des premier et second degrés.
  • 3
    Commission tripartite : Conditions d’établissement d’un PAI en cas de risque d’urgence allergiques alimentaires. Rev Fr Allergol Immunol Clin 2003 ; 43 : 415-8.
  • 4
    Dutau G. Les allergies alimentaires de l’enfant : Aspects actuels et perspectives. Concours Med 2000 ; 122 : 669-75.
  • 5
    Juchet A, Chabbert-Broué A, Micheau P, Piot M, Brémont F. Évolution naturelle de l’allergie alimentaire chez l’enfant. Rev Fr Allergol Immunol Clin 2003 ; 43 : 186-91.
  • 6
    Moneret-Vautrin DA, Romano M, Kanny G, et al. Le projet d’accueil individualisé pour urgence allergique. Presse Med 2003 ; 32 ; 61-6.
  • 7
    Romano M. Le projet d’accueil individualisé et son adaptation au domaine de l’allergie alimentaire. Eur Ann Allergy Clin Immunol 2003 ; 35 : 17-27.

Date de mise en ligne : 01/01/2008

https://doi.org/10.3917/spub.061.0151

Notes

  • [1]
    Département universitaire de santé publique, UFR médecine Angers, 49045 Angers cedex 01.
  • [2]
    Service de promotion en faveur des élèves, 49000 Angers.

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